On passe un réjouissant moment avec cette "Folle journée" qui se distingue par sa remarquable distribution (coup de cœur pour Antoine Prud'homme de la Boussinière drôlissime dans le rôle de Chérubin) et un texte qui résonne avec notre époque lors des monologues...

N'en déplaise aux critiques coincés du Masque et la plume entendus en juillet dernier à Avignon, ce spectacle fut réjouissant, vif et rondement mené avec des comédiens épatants dont Grégoire Œstermann très facétieux en Comte dindon dans cette farce, l'incroyable Annie Mercier en Marceline à la voix d'outre tombe, ou encore le truculent Antoine Prudhomme de la Boussinière en chérubin... Philippe Torreton en valet inédit, très charismatique, de grande profondeur, campe un Figaro sensible : il offre aux spectateurs une lucidité sociale, une résonance politique contemporaine.

Des poubelles incendiées et plusieurs barricades encore bien présentes - et bien pesantes... - dans le quartier de La Scala. Un restaurant brûlé non loin, le trafic particulièrement clairsemé en ce jour embrasé de "Bloquons tout", qui a déjà sa page Wikipédia. Le Mariage de Figaro est, plus que jamais, ce 10 septembre, le mariage entre l'insurrection qu'il provoqua en son temps et celle qui ne s'est jamais tue depuis. Le pouvoir change continuellement de mains, mais pas de nature.
Dans une interaction physique et visuelle très forte avec une immense toile de Jouy instable, en plein mouvement, on assiste à un détournement contemporain de son usage traditionnel. Ses motifs monochromes aux allusions traditionnellement subtiles à la sensualité, à la galanterie ou aux jeux amoureux deviennent ici explicites, joyeusement pornographiques. Plus qu'un simple motif décoratif, cela transforme la toile de décor en un acteur au symbolisme accentué. Modulable à volonté, déployée ou retroussée, piétinée ou traversée, elle modifie les perspectives et les plans de la scène, créant des effets d'ombre, de lumière, de révélation. Symbole évident de l'Ancien Régime, cette toile de Jouis (qu'on se plairait volontiers à orthographier ainsi) incarne son féodalisme sexuel, ce sombre "droit de cuissage" que Beaumarchais remet en cause si frontalement.
Léna Bréban imagine une version moderne et foisonnante de l'univers de Beaumarchais, où chaque figure secondaire a droit à son spin-off, prend soudain toute la lumière et reçoit sa part de gloire - même dans un château où seuls les nobles sont censés briller. Un casting d'enfer met le feu au baril de poudre.

Un Mariage de Figaro mené "tambours battants" par des comédiens de haut vol. L'on s'y amuse beaucoup, l'accent marqué sur ce qui est plus particulièrement d'actualité donne toute sa saveur à ce texte de Beaumarchais et nous rappelle que les façons de vivre évoluent beaucoup plus vite que les humains.

Totalement en desaccord avec le commentaire précédent.
Magnifique interprétation de toute la troupe, avec un grand Torreton en tête qui joue avec une superbe énergie durant 2 heures.
Quel plaisir de re-découvrir cette pièce classique jouée avec tant de talent
Et puis, le monologue de Figaro reste toujours d'une brûlante actualité en cette période.