La salle est comble et, ô surprise, pour une fois, le public est jeune ! Mehdii Djaadi, en véritable conteur, a su fédérer en quelques années cette frange de la population moins encline à fréquenter les grandes scènes. Son secret ? Une certaine nonchalance mâtinée de douceur et surtout d'humour. Mais Mehdi n'est pas pour autant un sniper comme ceux de la génération Z des "comedy-clubs", Mehdi donne à réfléchir, il se veut courroie de transmission. Alors, comme il est caméléon et plutôt doué, il interprète tous les personnages pour illustrer son récit, tous plus truculents les uns des autres, de la responsable du stage de déconstruction à l'infirmière black en passant par la marmotte, n'hésitant pas à faire participer le public, à lui adresser moult clins d'œil. Et ça marche ! Parce qu'il est sincère, proche des gens, qu'il parle avec ses tripes de son expérience personnelle douloureuse, de ses deuils périnataux. Malgré sa haute stature, le colosse se sait vulnérable et c'est cette belle humanité qui émeut avant tout.

Son long pèlerinage comme son besoin de se ressourcer "en région" - clin d'œil taquin aux bobos Parisiens -, de retrouver les plaisirs simples, ceux connus dans son enfance où le partage était la vertu première, est l'aveu d'une grande simplicité, non feinte, non calculée. Mehdi a connu toutes les conversions : d'une jeunesse chaotique à l'adulte rangé, il a épousé toutes les religions, s'est même converti, jusqu'à les interroger aujourd'hui. Il y a de la tristesse dans ce désir de paternité semé d'embûches mais toujours l'espoir au bout. Il peut tomber mais toujours se relève et la salle ne s'y trompe pas qui, face à tant de générosité et de talent, lui offre chaque soir une standing-ovation amplement méritée. Ce nouvel opus est l'opus de maturité qui traduit plus que jamais son besoin viscéral de partage, sans forfanterie, juste avec les mots qu'il faut pour toucher les coeurs, et quelques punchlines bien senties pour dédramatiser avec cet œil rieur et ce sourire permanent ! Chapeau, l'artiste !