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Jean-Claude Dreyfus
F. Vallon
Dossier par Philippe Escalier
Jean-Claude Dreyfus est «L'Acheteur»!
Coups de griffes sur la toile !

Une pièce intelligente et drôle opposant un jeune artiste-peintre à son client profane et insidieux. Jean-Claude Dreyfus (l'acheteur) et Serge Gisquière (le peintre) interprètent avec aisance et subtilité cette comédie "bras de fer" dont la toile de fond n'est autre que le combat entre l'art et l'argent, la jeunesse et la maturité, l'utopisme et la réalité...
Les deux hommes, que la condition sociale, l'age et la pensée séparent, vont se livrer à un véritable affrontement autour d'un tableau que l'un convoite et que l'autre veut conserver, tous deux pour des raisons profondément différentes...
Jean-Claude Dreyfus, artiste aux talents multiples, impossible à cataloguer, toujours présent là où on ne l'attend pas, nous a accordé une interview à cœur ouvert. Après quoi, nous esquissons un portrait de Serge Gisquière, peintre, auteur et comédien aux talents prometteurs.



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Retour sur scène de Jean-Claude Dreyfus

tatouvu: - Comment s'est faite la rencontre avec "L'Acheteur" ?
Jean-Claude Dreyfus: - Il se trouve que Serge Gisquière est le copain d'une actrice avec laquelle je jouais, il y a quelques années. Je l'ai rencontré lorsqu'il exposait ses tableaux. Ses belles couleurs et ses grosses femmes m'ont fait craquer. Nous nous sommes revus en diverses occasions. Il m'a donné à lire sa toute première pièce, Le Poliotique, que l'on a failli jouer. Pour le détail, cette histoire (magnifique) d'un chef d'État paralysé m'aurait fait passer d'un fauteuil roulant à un autre puisque je sortais de L'Hygiène de l'assassin. Il m'a proposé L'Acheteur qui m'a plu. Je pense vraiment que ce spectacle peut créer un engouement, un événement sur la rencontre et les échanges entre ces deux hommes. Sur scène, nous sommes dans une espèce d'intimité qui pourrait presque faire penser à du théâtre d'appartement.

- Une scène sur laquelle on ne vous a pas vu depuis plus de trois ans !
JCD: - Depuis Le Malade imaginaire et L'Accommode sans tiroir (sur des textes de Cocteau ndlr). Pendant ce temps, j'ai fait d'autres choses, un tour de chant et plusieurs tournages, notamment Deux Frères de Jean-Jacques Annaud. Trois mois en Asie mis à profit pour visiter des temples au Cambodge, me balader, rencontrer des gens. Bien sûr, là-bas, personne ne me connaît, ils n'avaient pas vu ma pub, grâce à Dieu ! Ils trouvaient que je ressemblais à Peter Ustinov ! J'ai fait aussi Le P'tit Curieux avec Jean Marboeuf, un film très émouvant. J'ai accepté ce film, pour le plaisir, Jean n'ayant comme tout budget que son avance sur recettes. L'histoire tourne autour d'un petit garçon, Milan Argaud, qui est un acteur magnifique, à la fois superbe et un peu vampire, doté d'une énergie incroyable.

- Vous n'avez pas chômé, d'autant que vous avez aussi tourné "L'Anglaise et le Duc" réalisé par Rohmer !
JCD: - Oui, sublime aventure et j'avais aussi un autre projet qui ne s'est pas concrétisé, la pièce de Pascal Elbé que Charles Berling devait mettre en scène à La Gaîté. Une chance (si je puis dire !), sinon j'aurais dû traverser Paris en courant tous les soirs. En tout cas, cela me laisse le temps de faire autre chose. Dernièrement, une fois le rideau tombé, j'ai filé à Noisy-le-Grand chez Max Cerveau qui organisait une superbe exposition autour du cochon, avec deux peintres et un sculpteur. J'ai apporté quelques pièces de ma collection et j'ai chanté huit chansons accompagné par mon pianiste et mon violoncelliste.

- Cette passion des cochons, d'où vient-elle ?
JCD: - Elle remonte à plus de vingt ans. On m'a offert des cochons parce que j'avais un caractère de "merde" ! Je me suis acoquiné avec cet animal, quoique non-collectionneur dans l'âme, ce qui m'a permis de parler d'autres choses que de ma vie. Depuis Delicatessen, les gens sont focalisés sur ce sujet. Je ne veux pas non plus ne parler que de ça, même si je suis en train de préparer une anthologie du cochon avec les Éditions du Cherche Midi pour le prochain Salon de l'agriculture.

- Comment qualifieriez-vous votre vie aujourd'hui ?
JCD: - Ma vie est simple. Je ne vis pas dans l'excentricité la plus totale comme lorsque j'étais plus jeune. À l'époque, je me baladais avec des talons de 12 centimètres sans plateforme, des bottes, vêtu d'un short au crochet, je ne me déguisais pas, pour moi, c'était naturel. D'ailleurs, on va pouvoir découvrir ces photos pendant l'émission de France 3 Le Fabuleux Destin (diffusée en avril ndlr) où ils veulent tout savoir sur moi... quand j'étais petit, moyen, plus grand... mais je ne vais pas tout leur dire ! Il est exclu de parler de mon entourage, la seule concession que je fasse, c'est avec mon chien ! Je ne veux pas que l'on sache trop de choses sur moi. Moi-même, je ne sais pas qui je suis... mystères et boules de gomme !

- Là, vous me jouez la comédie !
JCD: - Non c'est vrai, par exemple je n'aime pas vivre seul, mais d'un autre côté, c'est lourd de vivre avec quelqu'un même si vous êtes très amoureux. La vie à deux doit être harmonieuse et ce n'est pas possible 24 heures sur 24 !

- Vous disiez donc : une vie simple ?
JCD: - Oui, menée par des lectures publiques de pièces, le travail pour mon prochain tour de chant, qui va s'intituler En toute sobriété, les tournages...

- Le boulot est omniprésent ?
JCD: - Le travail, c'est aussi la liberté ! C'est faire ce que j'aime. Mais je peux passer une après-midi entière tranquillement dans un bistro. D'ailleurs, le théâtre ne m'a pas manqué pendant trois ans, même si je suis content de reprendre. Comme je serai content de m'arrêter !

- En somme, quoi qu'il arrive vous êtes toujours heureux !
JCD: - Oui, mais soyez gentil, ne titrez pas : "Jean-Claude Dreyfus, un imbécile heureux." (Rires)! Je plaisante mais l'autre jour, dans un journal auquel j'ai eu le malheur de dire que j'avais une vie simple, ils ont titré en lettres capitales "Commun comme Dreyfus" !

- On va tâcher d'être plus subtil ! Cette simplicité signifie-t-elle que vous n'avez aucun rêve, aucun fantasme ?
JCD: - Si, j'en ai trois... J'aurais voulu jouer du piano, savoir peindre et j'aurais aussi voulu naître une année bissextile... on vieillit moins vite (rires) ! Sinon, j'adorerais pouvoir disparaître pour aller toucher les fesses des gens et ensuite réapparaître comme si de rien n'était (rires) ! Alors, disparaître ça m'arrivera bien un jour, mais vais-je réapparaître ?

- Ce n'est pas donné à tout le monde ! Pour en revenir à votre caractère, diriez-vous que vous êtes quelqu'un de sauvage ?
JCD: - Complètement, même si je n'en ai pas l'air ! Déjà plus jeune quand je sortais beaucoup, j'étais solitaire, quoique toujours avec des copains. J'avais un côté très voyeur, aimant regarder tout ce qui se passait. Je sors beaucoup moins maintenant, pour pouvoir me lever tôt et surtout... garder ce teint de bébé !

- Avant de terminer, si vous nous disiez quelques mots sur vos débuts ?
JCD: - J'ai été en classe jusqu'à 14 ans. Quand je suis revenu du préventorium, j'avais un voile au poumon, j'étais si mauvais élève que mes parents m'ont mis à l'école du spectacle, l'école des cancres ! Je n'ai aucun regret ! Ensuite, j'ai fait de la prestidigitation. Puis, j'ai joué pendant six ans à La Grande Eugène, un cabaret transformiste. Avec Belle de Mai et Badabou, un show très provocant et très beau. J'étais Erna von Scratch et portais des robes de Sarah Bernhardt ou de Barbra Streisand ! Tout Paris était là ! J'ai fait une tournée en Italie, après quoi, j'ai tout arrêté pour jouer L'Échange de Claudel au Théâtre de la Ville. Mon premier tournage est arrivé dans la foulée. Ce fut L'homme qui défia l'organisation, un film italien que je n'ai jamais vu et où j'ai passé la moitié du temps en femme !

- Dans quelques mois, vous retrouverez le monde de la magie : heureux, j'imagine ?
JCD: - Ô combien ! On reprend à partir du 11 septembre (une date facile à retenir), The Great Zoltan, le spectacle de Gérard Majax que j'ai mis en scène, tout comme Recette de Jeannine Worms, que je prépare actuellement avec Oscar Sisto et Éric Laugerias en concierges refaisant le monde. Comme vous voyez, si mon existence est simple, elle n'a rien d'ennuyeux !



Serge Gisquière,
2004 : année faste !

Beaucoup ont croisé pour la première fois Serge Gisquière en 2001, dans "Excès Uomo". Depuis quelques semaines, le voilà de retour avec "Qu'est-ce que sexe ?" dont il a signé l'adaptation pour Michel Leeb, avant de jouer sa propre pièce aux côtés de Jean-Claude Dreyfus.

Ce grand garçon musclé et imposant est un insatiable curieux. La preuve : né en Belgique, il finit ses études à HEC pour se lancer, immédiatement après, dans... le mannequinat ! Il fait assez vite le tour de la question et, passionné de moto, envoie une candidature spontanée pour dessiner dans un magazine consacré aux deux-roues. On le rappelle, mais pour lui proposer une place de pilote d'essai. Qu'à cela ne tienne, il accepte ! Ce nouveau job lui permet de participer à un rallye en Afrique. Bien classé, M6 le remarque et le fait travailler pour Turbo. Serge se tourne ensuite vers la peinture. "Comme l'écriture, c'est un moment de création troublant où l'on se retrouve face à soi-même", dit-il. Sa première exposition connaît le succès dans le Marais.
Mais l'artiste n'en a pas fini avec ses désirs d'exploration. C'est l'époque où l'une de ses amies comédienne, lui fait passer un casting pour une pièce d'Anouilh au théâtre de l'Atelier. Pierre Franck, le metteur en scène, l'engage ! "Heureusement, j'étais entouré de gens du métier, très généreux, car certains soirs, je ne devais pas briller beaucoup, je n'avais jamais pris un cours de ma vie !"
Improviser et surprendre n'est pas pour lui déplaire. Son allure sportive, ses pantalons de cuir, sa modestie naturelle font, qu'à première vue, on l'imagine mal dans la peau d'un intello. Ne jamais se fier aux apparences ! L'Acheteur, que le public découvre en ce moment, est une heureuse surprise. Humblement, il avoue avoir bénéficié d'une certaine part de chance : "Le miracle, c'est d'avoir des gens comme Jean-Claude Dreyfus ou Jean-Luc Moreau qui ont envie de travailler avec moi !" Pour l'occasion, il retrouve Pierre Franck devenu directeur de l'Hébertot. Avec tout cela, pas trop fatigué ? "Dans ce métier, quand tu es bien crevé, c'est bon signe !", répond-il en souriant. Personne ne doute que ces temps-ci, Serge Gisquière ne soit heureux et, parfois, peut-être, un peu crevé !
Paru le 06/05/2004
ACHETEUR (L)
STUDIO HÉBERTOT
Du mardi 23 mars au samedi 22 mai 2004

COMÉDIE DRAMATIQUE. Dans le modeste studio qui lui sert d'atelier, un jeune peintre reçoit la visite d'un industriel fortuné. Bien que profane, l'acheteur se dit intéressé par son travail et plus particulièrement par une toile, la seule qui soit accrochée au mur, et dont le peintre refuse de se séparer. Repoussant le...

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