Ici, pas de résilience possible. Le verdict n'apporte pas de soulagement. La victime aura le choix du châtiment ultime sous le regard supposé neutre de deux fonctionnaires.
Les dialogues sont écrits comme on parle, avec de fréquentes ellipses, ils nous immiscent dans un réalisme quasi documentaire.

debbie tucker green, un nom tout en minuscules pour une auteure majeure. C'est dans les ellipses d'une langue hachée, saccadée, et tendue comme une corde raide, qu'elle tente de contenir l'horreur des vies qui se délitent dans l'infamie d'un crime abject restant, jusqu'au bout, innommable. Qu'on ne veut ou qu'on ne peut nommer, car on pourrait difficilement lui accorder un nom sans se voir détruire une deuxième fois. Avec l'humanité qui surgit, par à-coups, de cette masse informe, pour redonner consistance à l'idée de l'utilité du pardon.
Sous la lumière violente des néons, trois excellents comédiens écrasés par des tâches administratives surhumaines dans une lutte sourde, sans contestation : ils sculptent avec hésitation la matière revêche de cette langue frissonnante, entre l'interdit d'empathie pour la victime et procédures mécaniques pour la "mettre à l'aise", et leurs propres valeurs personnelles qu'ils se doivent d'étouffer - afin de respecter la procédure. Rires sardoniques et haut-le-coeur se côtoient au contact rugueux de cette corde accrochée à un point seulement, et dont la partie inférieure restant libre, tangue vers une fin ouverte.