Un long drap ou toile qui flotte, en fond de scène, quelques éclairages, une très longue table à rendre jaloux un Poutine et ils apparaissent en costumes d'époque pour une joute verbale sentie, documentée. Les deux frères ennemis vont s'affronter sous nos yeux pendant plus d'une heure. La pièce est historique puisque ce sont, pour partie, des fragments de discours des deux mais elle est aussi politique et d'actualité car elle résonne sur bien des points à l'oreille du public qui écoute, bouche bée, ce duel oratoire. Nous sommes sous la Terreur et deux avis s'opposent. Robespierre apparait, séduisant mais roide, c'est l'ascète psychorigide. Face à lui , Danton, le jouisseur, amateur de femmes et de bonne chère, un brin plus tolérant, voire avant-gardiste puisqu'il envisage déjà le vote des femmes. Tout chez eux traduit un idéal, ils se respectent par ce biais même s'ils n'entendent pas y parvenir par les mêmes moyens et on voit l'histoire se dérouler sous nos yeux avec les conséquences quelques siècles plus tard. L'histoire se répète, dit-on. La leçon, en tout cas, nous est donnée et à nous d'y réfléchir. Quelques questions forcément nous interpellent : peut-on gouverner par la peur ? La dictature est-elle un passage obligé avant l'état démocratique ?

Des questions que le public aurait pu poser car le spectacle, sachez-le, se poursuit même dans la rue, à la sortie du théâtre.
Voilà du théâtre populaire, intelligent, instructif, servi par deux bons comédiens : Nathalie Mann, touchante en Robespierre dans son idéalisme sincère et Hugues Leforestier, l'auteur de cette pépite, est un Danton truculent, généreux et... lucide !

Courez les applaudir.