Zoom par Patrick Adler
Le roi se meurt
Gémeaux Parisiens
Il se chuchotait dans le Landerneau du théâtre que le Roi Lidon, fort de son joli succès Avignonnais, allait débarquer dans la capitale. Rien n'était moins sûr vu l'agenda Royal. Et puis, la nouvelle est tombée il y a peu sur les téléscripteurs. Le Roi allait arriver en grande pompe aux Gémeaux Parisiens. On ne change pas une équipe qui gagne, me direz-vous. Des Gémeaux Avignonnais aux Gémeaux Parisiens, il n' y avait que quelques lieues de calèche à franchir et le cocher fut bien avisé d'emprunter les belles routes de France pour faire claironner la nouvelle. Alors, puisqu'IL est là... tous aux Gémeaux Parisiens !
Je lis, tu lis, il... Lidon ? C'est donc une lecture nouvelle de l'œuvre mythique de Ionesco que nous propose Christophe Le Bien-aimé au Royaume des Gémeaux. Elle résonne plus que jamais au moment où la planète se craquelle de toutes parts. La scénographie, les décors, les costumes sont de... Non, vous n'êtes plus "Au théâtre ce soir" et Caldwell et Hart sont depuis longtemps remplacés par des hommes-orchestres de la trempe du Roi Lidon. Ayant l'œil sur tout, il fait... tout ! Il habille la scène comme les acteurs, qui sont - majestueusement - à son service depuis deux décennies et contrairement à la pièce, donnent à son royaume stabilité et éclat.
Si, chez ionesco, "Le Roi se meurt", aux Gémeaux, il est plus que jamais vivant, captivant, bouleversant. Chef-d'œuvre !
En Absurdie, fief de Béranger, on ne voit pas, on ne veut pas voir, on s'accroche à des hochets comme le sceptre, la couronne, la favorite qui pleure et qui rit et, pendant ce temps-là, comme disait feu Chirac - on excusera le jeu de mots - "la terre brûle". C'est ce monde de l'impermanence, du volatile, où chacun est appelé à mourir, malgré son semblant de pouvoir dont il use et abuse que pointe Lidon avec une théâtralité très esthétisante. Les ministres, garde rapprochée de Béranger, sont tombés à l'eau, le peuple - ses sujets donc - sont réduits à peau de chagrin, la favorite perd son philtre d'amour, le médecin-bourreau part avant la fin. Les messages radio, comme sur une croisière, s'entrechoquent : on annonce, on corrige, tout se précipite. Le médecin, qui se pique d'expertise, annonce, du haut de sa lunette et des rapports-vidéo, l'inexorable fin, minutée de surcroit. La Reine-bis, en guide avisée, le soutient, elle joue les Cassandre et subit les foudres du Roi. Faisant fi de la réalité en mode "Le Roi se meurt... mais ne se rend pas" alors que la fissure s'agrandit sur le mur, Béranger s'accroche désespérément. C'est un roi-marionnette terriblement humain, qui revoit toute sa vie défiler, qui se délecte à écouter ses pseudo-actes de bravoure égrenés par un pseudo-chambellan, qui se rassure dans les bras de la Reine. C'est un Roi humain avec ses fragilités, son aveuglement. Il est ridicule, pathétique mais quelque part, il nous ressemble, il est comme nous, banal et mortel ! La pièce résonne plus que jamais avec ces crises à répétition, pandémies, crues, séismes. Assistons-nous, comme Béranger, à la fin d'un monde ? Et si notre petit orgueil, notre vanité de despote et celle de nos dirigeants refusaient de voir le néant qui nous attend... ? Car malgré les pouvoirs de droit divin que semble s'octroyer Béranger, sa fin de vie est une "banale song" où l'œil se ferme, où la raison s'égare, où - ironie du sort - la Reine-bis, la mal-aimée, assure les soins palliatifs avant le passage au Rien. En desserrant le poing qui renferme son château devenu château de sable, les derniers grains du sablier de sa vie sont tombés. Sur le mur, on assiste à l'éboulement final.
Le théâtre a cette vertu de lanceur d'alerte et c'est à dessein qu'avec une scénographie, des éclairages et une bande-son - tous résolument modernes - que Christophe Lidon nous offre une vision très actuelle du "Roi se meurt". Empreinte d'humanisme et de poésie, avec une fantasmagorie à la Tim Burton, voilà un petit bijou théâtral qui fera date ! Vive Le Roi Lidon !
Si, chez ionesco, "Le Roi se meurt", aux Gémeaux, il est plus que jamais vivant, captivant, bouleversant. Chef-d'œuvre !
En Absurdie, fief de Béranger, on ne voit pas, on ne veut pas voir, on s'accroche à des hochets comme le sceptre, la couronne, la favorite qui pleure et qui rit et, pendant ce temps-là, comme disait feu Chirac - on excusera le jeu de mots - "la terre brûle". C'est ce monde de l'impermanence, du volatile, où chacun est appelé à mourir, malgré son semblant de pouvoir dont il use et abuse que pointe Lidon avec une théâtralité très esthétisante. Les ministres, garde rapprochée de Béranger, sont tombés à l'eau, le peuple - ses sujets donc - sont réduits à peau de chagrin, la favorite perd son philtre d'amour, le médecin-bourreau part avant la fin. Les messages radio, comme sur une croisière, s'entrechoquent : on annonce, on corrige, tout se précipite. Le médecin, qui se pique d'expertise, annonce, du haut de sa lunette et des rapports-vidéo, l'inexorable fin, minutée de surcroit. La Reine-bis, en guide avisée, le soutient, elle joue les Cassandre et subit les foudres du Roi. Faisant fi de la réalité en mode "Le Roi se meurt... mais ne se rend pas" alors que la fissure s'agrandit sur le mur, Béranger s'accroche désespérément. C'est un roi-marionnette terriblement humain, qui revoit toute sa vie défiler, qui se délecte à écouter ses pseudo-actes de bravoure égrenés par un pseudo-chambellan, qui se rassure dans les bras de la Reine. C'est un Roi humain avec ses fragilités, son aveuglement. Il est ridicule, pathétique mais quelque part, il nous ressemble, il est comme nous, banal et mortel ! La pièce résonne plus que jamais avec ces crises à répétition, pandémies, crues, séismes. Assistons-nous, comme Béranger, à la fin d'un monde ? Et si notre petit orgueil, notre vanité de despote et celle de nos dirigeants refusaient de voir le néant qui nous attend... ? Car malgré les pouvoirs de droit divin que semble s'octroyer Béranger, sa fin de vie est une "banale song" où l'œil se ferme, où la raison s'égare, où - ironie du sort - la Reine-bis, la mal-aimée, assure les soins palliatifs avant le passage au Rien. En desserrant le poing qui renferme son château devenu château de sable, les derniers grains du sablier de sa vie sont tombés. Sur le mur, on assiste à l'éboulement final.
Le théâtre a cette vertu de lanceur d'alerte et c'est à dessein qu'avec une scénographie, des éclairages et une bande-son - tous résolument modernes - que Christophe Lidon nous offre une vision très actuelle du "Roi se meurt". Empreinte d'humanisme et de poésie, avec une fantasmagorie à la Tim Burton, voilà un petit bijou théâtral qui fera date ! Vive Le Roi Lidon !
Paru le 08/12/2025
(21 notes) THÉÂTRE DES GEMEAUX PARISIENS Jusqu'au vendredi 6 février 2026
THÉÂTRE CONTEMPORAIN à partir de 12 ans. Le roi Bérenger ne veut pas le reconnaître, il va mourir.... Son royaume se dégrade et malgré l'accompagnement de ses deux reines et de son entourage, il enrage. Voici le parcours de cet homme jusqu'à la fin, de son pouvoir, de sa vie, de Tout... Avec ce texte devenu classique, Ionesco nous offre ...
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