Tout est allé très vite pour Clément Marchand, auteur et metteur en scène de cette pépite, et Jean-Baptiste Guinchard et Guillaume Tagnati, ses comédiens. Une avant-première sous forme de générale de presse à la Pépinière en 2024, les premiers articles, tous dithyrambiques, et les premières propositions de salles dès juillet avec l'arrivée aux Corps Saints d'Avignon pendant le Off, où ils vont afficher « complet » deux années de suite, s'offrent même le luxe d'un nouvel opus en 2025 : « Dans la forêt lointaine », très différent cette fois. Paris les attendait. Forcément. Et le choix du Lepic, auréolé de ses trois Molières, augure déjà du meilleur.

C'est l'histoire de deux gars qui n'auraient jamais dû se rencontrer. L'un est tombé dans la marmite, l'autre pas. Entre le lunaire et le terrien, entre le poète et le footeux un lien se tisse, qui grandit, se brise, se reconstruit. La cuisine, c'est un milieu d'hommes avec sa violence, ses coups. Sans désacraliser les chefs, l'auteur pointe bien les épreuves à traverser pour arriver à... l'étoile. Entre cadences infernales, petites et grandes vexations, harcèlement, racisme, sexisme, c'est tout un système déifié et fantasmé qui est pointé du doigt. Alors, qui des deux « frères » gagnera le Graal ?
Avec une direction d'acteurs au cordeau et le très beau travail de Julien Barillet sur les éclairages, Clément Marchand signe une pièce sur le monde de la gastronomie - un thème rarement exploré au théâtre - qui ne manque ni de saveur, ni de piquant, ni d'amertume. Ce menu « émotion et humour » est à savourer sans modération.