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© Fabienne Rappeneau
Dossier par Philippe Escalier
La Maison du Loup
à la rencontre de Jack London

Dans sa nouvelle pièce, Benoît Solès s'est intéressé à un épisode de la vie de Jack London. Présentée lors du festival d'Avignon 2021 au Chêne Noir, « La Maison du Loup » mise en scène par Tristan Petitgirard, est à l'affiche du Théâtre Rive Gauche, jouée par un trio formé d'Anne Plantey, d'Amaury de Crayencour et de l'auteur.
La vie de Jack London est un roman. Marié deux fois, chercheur d'or, chasseur de phoques, pilleur d'huitres, agriculteur, reporter et correspondant de guerre, le célèbre auteur américain a eu le temps, durant sa courte vie, d'exercer de multiples activités palpitantes tout en écrivant une cinquantaine de romans et une multitude de nouvelles. Ce romancier aventurier écrit, un an avant sa disparition, en 1915, « Le Vagabond des étoiles » dont le retentissement sera à l'origine d'une réforme des prisons californiennes. C'est ce roman qui a inspiré Benoît Solès pour «La Maison du Loup».

Benoît Solès : auteur, interprète de Ed Morrell


Après « Appelez-moi Tennesse » et « La Machine de Turing », « La Maison du Loup » est la troisième pièce jouée et éditée par Benoît Solès. À l'origine, en 2020, tout part du questionnement : qu'écrire après le succès un peu paralysant de Turing ? « J'ai eu d'instinct l'idée de m'intéresser à l'aventure et au voyage. En marchant rue des Teinturiers à Avignon, je suis tombé sur un exemplaire de « Martin Eden » de Jack London. Sur la 4eme de couverture était mis en avant « Le Vagabond des étoiles », un titre assez peu connu. Je me suis empressé de lire l'histoire de ce prisonnier, au moment où j'étais moi-même confiné dans les Landes ». Coup de cœur. Par modestie ou par peur, Benoît Solès commence par en faire une adaptation avant de s'intéresser au héros du roman, Ed Morrell, qui apprend à s'auto hypnotiser pour échapper à d'horribles conditions de détention. Célébrant la supériorité de l'esprit sur le corps, il s'avère être, en quelque sorte, l'opposé de Jack London dont l'image est associée à la force physique et aux grands espaces. « J'ai creusé pour en savoir davantage ce qui m'a permis de mieux imaginer ce qu'avait pu être leur rencontre sous l'égide de Charmain London si importante dans la vie de son mari avec qui elle forme un couple moderne. Ed Morrell est un grand personnage dans lequel je pouvais m'immiscer, un révolté venu rappeler ses idéaux perdus à un homme de gauche embourgeoisé. De leur confrontation jaillissent des sujets intemporels : l'inspiration, le retour à la nature, l'addiction à l'alcool, le traitement infligé aux animaux, la place des femmes dans la société, les violences policières, la peine de mort ».

Après sa création et ses dates de tournée, « La Maison du Loup » arrive à Paris, au Rive Gauche, riche d'une certaine maturité. « J'aime bien le temps long au théâtre, pouvoir jouer les pièces sur la durée. Pour les comédiens, revenir, après une pause, sur un rôle, leur permet de l'enrichir. Dans tous les cas, nous allons nous retrouver tous les trois, deux ans après la création, avec un plaisir certain ! ».

Anne Plantey interprète de Charmian London


Le théâtre est une passion très ancienne pour cette jeune comédienne qui débute, dans le Lot et Garonne, avec le même professeur que Benoît Solès, Marianne Valéry, qui suit depuis leur carrière très attentivement. Parmi les derniers succès auxquels elle a participé, figurent en bonne place « Adieu Monsieur Haffmann » qu'elle joue un peu plus de cinq cents fois et avec lequel elle partira au bout du monde et « Rupture à domicile » jouée avec Olivier Sitruk et Benoît Solès qu'elle retrouve alors pour ne plus le quitter. Avant « La Maison du loup », elle participe au succès de « La Machine de Turing » en assistant le metteur en scène Tristan Petitgirard (avec lequel elle a aussi beaucoup travaillé).
"La Maison du loup" a une histoire particulière puisque Benoît Solès l'a écrite, confiné dans une maison des Landes avec Anne Plantey : « C'est la première fois que j'ai assisté à l'écriture d'un rôle pour moi en voyant le personnage se dessiner sous mes yeux. J'ai pu constater la masse de travail que cette pièce a représenté pour lui et c'était formidable, tous les soirs de pouvoir découvrir ce qu'il avait écrit dans la journée. »

Son rôle de Charmian Kittredge, femme de Jack London, elle y est très attachée. « C'était une femme extraordinaire, moderne, prônant l'amour libre, faisant de la politique. On parle souvent des femmes derrière les grands hommes mais Charmian London était résolument aux côtés de son mari. Si elle retapait ses textes, elle a aussi signé certains passages de description qu'il n'aimait pas écrire. On lui doit donc beaucoup dans le travail de Jack London qu'elle a porté à bout de bras quand il était en train de sombrer. Elle a âprement défendu son œuvre après lui tout en vivant pleinement sa vie de femme émancipée. »

Dans « La Maison du Loup », Anne Plantey joue pour la première fois avec Amaury de Crayencour avec lequel elle a été en formation (une classe avant lui) au Théâtre Studio d'Asnières.

Amaury de Crayencour dans le rôle de Jack London


Le comédien a toujours su alterner la scène et l'image. Avant de reprendre les répétitions au Rive Gauche, il tournait à Marrackech « Tous frais payés » de Frank Bellocq, que l'on verra sur les écrans en 2024 et où il incarne le fils aîné de Michèle Laroque et Gérard Darmon. Dès la rentrée, le 27 septembre 2023, les spectateurs pourront le voir dans «Nouveau départ» le film de Philippe Lefebvre avec Franck Dubosc et Karin Viard.

À la télé, il a, depuis quatre ans, un rôle récurrent dans « César Wagner » et vient de tourner la saison 7 de « Sam ». Le plaisir d'intégrer la série en même temps qu'Hélène de Fougerolles a accru l'intérêt de son personnage, Maxime, un sale type arrivé de Dubaï les poches pleines d'argent. Une rupture salutaire avec ses rôles de gendre idéal, lui permettant d'explorer de nouveaux univers plus riches et contrastés à l'image de celui de Jack London auquel il donne vie dans « La Maison du Loup ». « L'auteur sur le déclin, passé par tellement d'aventures, finissant sa courte vie sous morphine, addict à l'alcool, revenu de tout après avoir fait fortune, a exigé un vrai travail sur la voix et sur le corps » explique-t-il. Le fait d'interpréter ce personnage historique ayant beaucoup parlé de lui dans ses nombreux livres a poussé Amaury de Crayencour à se plonger dans son œuvre. Cette démarche lui a permis d'enregistrer le livre audio « Dix nouvelles de Jack London » dans lequel on retrouve les thèmes favoris de l'auteur porteurs de saisissantes leçons de vie. Le texte de Benoît Solès avec sa précision, sa capacité à décrire les ambiances de la Californie en été et de cette grande maison ont permis à Amaury de Crayencour de donner de singuliers accents de vérité à sa nouvelle incarnation.

Avec Jack London et « La Maison du Loup », ces trois excellents comédiens vont nous entrainer dans une surprenante histoire et surtout une belle aventure. De cela, personne ne s'étonnera !
Paru le 06/10/2023

(102 notes)
MAISON DU LOUP (LA)
THÉÂTRE RIVE-GAUCHE
Jusqu'au dimanche 19 mai

THÉÂTRE CONTEMPORAIN. Après La Machine de Turing (4 Molières 2019), la nouvelle création de Benoit Solès. Entrez dans La Maison du loup, le repaire d’un écrivain américain mythique : Jack London. Vous y rencontrerez sa partenaire, Charmian, et le mystérieux Ed, porteur d’un lourd secret. Dans un superbe décor, vous ver...

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