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© Pascal Ito
Dossier par Philippe Escalier
1983

Pour sa rentrée, le Théâtre de la Porte Saint-Martin met Chantal Ladesou à l'honneur avec «1983», la nouvelle comédie écrite pour elle par Jean Robert-Charrier.

Chantal Ladesou

Avec Jean Robert-Charrier, vous tenez votre auteur attitré !
En effet. Je crois que je l'inspire beaucoup ! Après plusieurs années de très belles pièces issues du subventionné, il voulait revenir au boulevard et qui il appelle ? Chantal Ladesou ! (Rires). En 2016, il m'avait déjà écrit «Nelson» que l'on nous demandait de reprendre mais lui comme moi voulions quelque chose de nouveau. Nous l'avons ! À la lecture, on a beaucoup ri et j'ai dit « banco » ! Je vais enfin retrouver ma loge, après qu'elle ait été squattée par d'autres comédiens (rires) !

En quoi la pièce vous a-t-elle séduite ?
J'ai aimé que ce boulevard soit différent, avec un vrai propos sur ces gens qui vivent dans un univers qu'ils ont du mal à comprendre. Je ne mets dans le lot, sans trop me plaindre tout de même, surtout si je me compare à mes copines. Elles sont larguées, notamment sur les réseaux sociaux, je suis l'ado du groupe si vous voulez et je leur donne des leçons. «1983» part un peu de ça. Je vais incarner une grande créatrice de mode qui, à moment donné, n'a plus d'idées et se réfugie dans un lieu retiré avec son assistant qu'elle martyrise, ce qui donne lieu à des scènes irrésistibles. Tout cela dure assez longtemps et puis un jour, son entourage parvient à la faire revenir mais elle ne supporte plus du tout le monde ultra connecté qu'elle découvre. C'est un bilan aussi lucide que drôle de notre époque.

Comme dans « Nelson », on vous retrouve associée sur scène avec Clémence Ansault, votre fille !
Clémence, qui a fait sa route de son côté, est abonnée à sa mère quand elle joue à la Porte Saint-Martin. Vous vous en doutez, ce n'est pas mon choix mais Jean Robert-Charrier l'avait adorée dans « Nelson » et voulait retravailler avec elle. Ceci dit, il n'y a pas que Clémence ! Jean a choisi aussi mon mari pour une scène assez courte en tout début de pièce. Lors de la première lecture, il nous a dépanné et a parfaitement tenu le rôle. Jean lui a donc fait cette proposition qu'il s'est empressé de refuser avant de dire « oui » (ah les hommes !) et de se prendre au jeu. Figurez-vous, il travaille comme une bête, me demande tout le temps s'il est bien, mais je veux que ce soit Jean qui le coache, pour éviter les engueulades. Je ne voudrais surtout pas contrarier ses débuts au théâtre. Peut-être va-t-on assister à la naissance d'une carrière sur le tard !

Que ferez-vous s'il a plus de succès que vous ?
Alors là, je le fais virer (rires) !

Passons à l'écran, on va vous voir prochainement dans Mask Singer sur TF1. Qu'est ce qui vous a fait accepter cette offre ?
J'aime bien l'émission. On m'a proposé de chanter dans un déguisement d'animal, mais il fallait que je prenne des cours et avec mon emploi du temps, ce n'était pas possible. Par contre, j'ai dit que je ferai volontiers partie du jury. J'ai été intégrée quand Alessandra Sublet et Jarry sont partis.

Vous venez de faire aussi du doublage, et c'est nouveau !
Oui, Dans « Buzz l'Eclair » j'ai un personnage fait pour moi en la personne de Darby Steel, une ancienne taularde venue en stage de Ranger de l'espace pour aider Buzz l'Eclair. C'est sympa, on est libres, décontractés et je n'ai pas besoin de me maquiller (rires) ! Mais tout ce que j'ai la chance de faire m'amuse beaucoup à la vérité. D'ailleurs, dans le cas contraire, je ne le ferai pas !

Jean Robert-Charrier

À l'approche de la quarantaine et de ses vingt ans au Théâtre de la Porte Saint-Martin, Jean Robert-Charrier met en scène Chantal Ladesou dans «1983», sa seconde pièce écrite pour la reine du boulevard.

Le point de départ de « 1983 » est bien évidemment l'actrice avec laquelle Jean Robert-Charrier partage une amitié complice. Cette nouvelle pièce a été écrite avec l'éclairage et l'expérience des dix-huit mois passés à jouer «Nelson» en 2014. « 1983 » est plus encore ciselée pour elle, depuis le rythme, jusqu'a la longueur des répliques avec un personnage fort imposé par son tempérament. Pour son scénario, l'auteur s'est nourri de sa désespérance pour certains travers de notre époque, en particulier les excès des réseaux sociaux qui s'immiscent partout, y compris dans le théâtre. Sentiment partagé par Chantal Ladesou, assez à contre-courant. « Il lui arrive aussi, de façon très drôle, d'être dépassée par les aspects insupportables de notre société. Je trouvais amusant de la confronter à la réalité d'aujourd'hui ». À la question de savoir si Chantal Ladesou se laisse diriger facilement, l'auteur et metteur en scène précise : « Plus qu'on ne le pense ! Elle a besoin de croire à ce qu'on lui demande et d'adhérer aux principes de mise en scène. On discute beaucoup mais quand c'est validé, elle s'y tient vraiment. Là, on fait un travail nouveau, on ne prend rien à la légère et elle se plie de bonne grâce à l'exercice. Une chose est certaine, c'est tellement une bête de scène, elle a un tel rapport avec le public, qu'il faut attendre le début des représentations pour qu'elle donne tout et que l'on retrouve vraiment l'actrice dans toute sa splendeur ».

Il n'y a pas eu de boulevard depuis « Nelson » à la Porte Saint-Martin devenue un lieu emblématique du mélange public-privé. Après sept années consacrées à des auteurs comme Thomas Bernhard mis en scène par Alain Françon par exemple, le théâtre a voulu revenir à la comédie avec pour objectif de présenter un spectacle qui soit, dans son genre, au niveau des pièces venues du subventionné auxquelles il a habitué ses spectateurs. Jean Robert-Charrier s'explique : « Je souffre un peu du travail sur la forme fait assez souvent dans le domaine de la comédie, trop stéréotypé et monté un peu vite. Ici, l'idée de départ est d'aller vers une mise en scène avec un scénographe et une créatrice lumière n'ayant jamais fait de boulevard mais qui sont passionnés par le recherche de formes nouvelles.» Le but avoué est de perturber le regard du spectateur et de le surprendre.

Après avoir supervisé en juin dernier la 72e édition du festival d'Anjou dont il est le directeur artistique depuis 2018, Jean Robert-Charrier a repris le chemin de son théâtre et ses habits d'auteur metteur en scène pour «1983». Si l'on peut légitimement l'imaginer heureux du chemin parcouru et des succès accumulés, il tempère néanmoins : « Le théâtre est un art premier, d'une importance vitale qui peut faire bouger la vie des gens et, en même temps, l'on doit constater le pourcentage très faible de la population concernée, moins de 3% et ce, pour l'ensemble des spectacles vivants. On se bat pour ramener un nouveau public dans nos salles mais c'est le défi le plus difficile auquel nous sommes confrontés ».
Paru le 10/10/2022

(39 notes)
1983 - St Martin
THÉÂTRE DE LA PORTE SAINT-MARTIN
Du mardi 27 septembre 2022 au dimanche 12 mars 2023

COMÉDIE. En 1983, après un succès fulgurant dans le monde de la mode, Michèle Davidson décide de se couper totalement du monde, quelques mois seulement, pour retrouver l’inspiration. Sauf qu’on est en 2022 et qu’elle est toujours enfermée…

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