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D.R.
Dossier par Philippe Escalier
Le théâtre du Splendid : une pépinière de talents

Depuis son ouverture, à la fin de l'été 1981, le théâtre du Splendid n'a cessé de découvrir de nouveaux champions du rire. Véritable « Olympia des comiques », selon la formule de Mimie Mathy, la belle salle rouge du faubourg Saint-Martin a su immédiatement inscrire son nom dans la liste des endroits mythiques où se forgent les renommées.
À l'heure de souffler les bougies de son vingtième anniversaire, le bilan du Splendid a de quoi faire des jaloux.
Les parrains terribles !

Les bonnes fées qui président à la naissance du Splendid ont pour noms Lhermite, Balasko, Jugnot, Blanc, Clavier, Chazel. Associés au sein d'une SARL chargée de gérer le nouveau lieu, ils constituent une assemblée d'actionnaires d'un autre type ! D'abord installée au 10 rue des Lombards, cette troupe connaît le succès avec Le Père Noël est une ordure, au point que l'endroit s'avère trop exigu. Trouver un théâtre devient urgent et les premières recherches permettent de tomber sur un music-hall de quartier, construit en 1890, ayant accueilli Mistinguett et Maurice Chevalier. L'endroit, transformé en cinéma, a assez de charme pour que la décision soit prise rapidement. Le nouveau Splendid s'installe au 48 rue du Faubourg-Saint-Martin. Si le one-man show de Gérard Jugnot, Enfin seul, est le premier spectacle à l'affiche, très rapidement, Papy fait de la résistance se joue en double horaire et, durant près de deux ans, mobilisera toute la troupe, à l'exception de Josiane Balasko qui va prendre la relève de Jugnot avec Bunny's Bar. La machine est lancée. Déjà, une organisation se met en place qui entend conjuguer sens du spectacle et professionnalisme.

Une direction bicéphale et complice

L'une des caractéristiques de la troupe du Splendid à ses débuts est d'écrire, de produire et de jouer ses propres spectacles. Bruno Moynot souhaite se voir adjoindre un alter ego. « Mon intention était de garder suffisamment de temps libre pour continuer à jouer et à écrire », précise-t-il. « Nous nous sommes tous fixés sur Christian Spillemaecker, qui avait fait partie du Café de la Gare à sa grande époque. » Ensemble, ils prennent la direction du nouveau théâtre. « Nous sommes très complémentaires et avons conclu un pacte qui nous oblige à nous entendre, puisque chacun dispose d'un droit de veto. En cas de désaccord, nous devons soit nous convaincre, soit abandonner le projet. » C'est ainsi que se résument vingt ans d'entente très cordiale.

La politique de la maison est de faire une «programmation qui nous plaise et dont nous soyons fiers. Nous avons refusé des gens dont nous savions qu'ils allaient cartonner, mais qui ne partageaient ni notre forme d'humour, ni notre exigence ». Les engagements se font sur une longue durée, parfois une saison, sans limitation en cas de succès. Ce qui, en cas d'échec, ne va pas sans poser de difficultés. « Il faut alors avoir le courage d'arrêter un spectacle et d'affronter le stress qui en découle. Nous avons dû le faire quelquefois », avouent-ils.

Un palmarès splendide !

Rares sont les scènes qui peuvent se targuer d'avoir vu débuter autant de talents : Valérie Lemercier, Muriel Robin, Jean-Marie Bigard, Éric et Ramzy, Mimie Mathy, Les Robins des Bois, Les Inconnus... impossible de les citer tous. Chaque rencontre est, bien sûr, différente. Celle avec Valérie Lemercier s'est faite suite à un appel de Jean-Michel Ribes. À sa demande, Bruno et Christian sont invités à auditionner la jeune femme. Le charme opère de suite, la décision de l'engager est immédiate. Mais le Splendid est aussi un lieu de théâtre. Deux pièces de Balasko y ont été montées : Nuit d'ivresse et L'Ex-Femme de ma vie, qui, avec Thierry Lhermite et Jane Birkin, fait un véritable tabac ! Plus proche de nous, la saison dernière, Le Béret de la tortue a connu un succès important, construit sur le meilleur vecteur possible : le bouche à oreille ! Le dernier spectacle à l'affiche, Plus vraie que nature, semble être engagé sur la même voie. La décision de le programmer s'est faite après que Bruno et Christian aient vu la première pièce de Martial Courcier, L'Opposé du contraire. Séduits, ils lui ont alors demandé d'écrire sa prochaine comédie pour eux, pariant à la fois sur ce nouvel auteur et sur une jeune actrice, Hélène Seuzaret. Avec, dans les deux rôles masculins, Didier Caron et Roland Marchisio (qui ont aussi joué dans Charité bien ordonnée), Plus vraie que nature, qui disserte sur la vie de couple avec une grande sensibilité et un humour cinglant et omniprésent, s'annonce comme l'une des meilleures comédies de la saison.

Un avenir visiblement radieux

Visiblement, Bruno Moynot et Christian Spillemaecker détiennent la bonne recette. Ne jamais se départir d'une certaine rigueur, faire le choix de la qualité, ont permis au Splendid de rester un théâtre populaire capable de s'autofinancer. Du reste, depuis neuf ans, la maison a évolué. Une partie de l'équipe d'origine a en effet racheté le tout proche théâtre de la Renaissance, dont la taille permet de donner à certains spectacles une plus grande envergure. Ainsi, au cours de la saison dernière, Une chatte sur un toit brûlant, justement distinguée par les Molières 2001, y a tenu l'affiche avec une distribution mémorable. Toutes les conditions sont réunies pour que le Splendid ait encore une longue vie passionnante devant lui.
Paru le 20/09/2001