Connexion : Adhérent - Invité - Partenaire

D.R.
Portrait par Jeanne Hoffstetter
Xavier Jaillard à la direction du Petit Hébertot
“Il appartient au directeur de ne pas faire de son théâtre un garage en louant sa salle au plus offrant.”

Auteur, comédien, metteur en scène, président de l'Association pour la création théâtrale européenne et créateur des Découvertes théâtrales du Studio Raspail, le voici depuis mars dernier directeur de théâtre.
Rares sont les auteurs qui, venant proposer au directeur d'un théâtre un texte de leur composition, repartent, au mépris de l'effort financier que cela suppose, avec les clés dudit théâtre. Ceci pour faire courte l'histoire... D'une voix tranquille et douce qu'accompagne volontiers le sourire, il raconte. "Je n'étais pas venu pour acheter un théâtre, je ne suis pas fou à ce point-là ! Je devais partir en tournée avec 'La Vie devant soi' que j'ai jouée à Paris durant un an (il ne dit pas que l'adaptation qu'il en a faite a obtenu trois Molière en 2008), mais j'avais fait le choix dans mon esprit d'auteur, de prendre mon bâton de pèlerin et de faire le tour de Paris pour présenter d'autres textes. Arrivé au Petit Hébertot, j'ai appris qu'ils allaient arrêter l'exploitation. C'est un joli théâtre, chaque place jouit d'une bonne visibilité et l'acoustique est remarquable, j'ai trouvé ça si dommage que j'ai repris le bail avec une période d'essai." Et le voilà, faisant tout pour que vive l'endroit, non pas en tant que salle ouverte aux propositions financières extérieures, mais en partenariat avec des productions artistiques. "Mon but est qu'il y ait une direction artistique vraie de manière à fidéliser une clientèle aimant tel type de spectacles. À mon avis, on arrive à faire vivre une salle en lui donnant une âme et une identité."

"Je privilégie les auteurs vivants, je suis intéressé par ce que le siècle produit et va laisser"


En bon égoïste il avoue en riant qu'il va aussi essayer de produire ou de faire produire ses propres textes. "Mais pas seulement !" Preuve en est qu'il choisit pour mettre la salle en lumière de frapper deux grands coups : Pierre Bellemare disant Alphonse Allais, puis René de Obaldia qui, à 90 ans, s'est permis de jouer, ravi, les prolongations devant le succès obtenu par ses lectures ! "Je propose dans mes 19 h 30 des choses atypiques : réflexions, découvertes théâtrales, lectures... Il y a un regain d'intérêt pour les seul-en-scène..." La deuxième partie de soirée est, elle, dédiée aux vraies pièces. "J'y privilégie les auteurs vivants. Ce n'est pas un hasard si j'ai créé le Festival de Bourgogne des auteurs et adaptateurs vivants, c'est vraiment mon truc ! Si je n'étais que comédien ou metteur en scène désireux d'être la muséographie du théâtre, je m'y prendrais autrement. J'ai joué les classiques avec plaisir, je ne crache pas dans cette soupe-là, mais je suis intéressé par ce que le siècle produit et va laisser. Vous n'imaginez pas le nombre de choses intéressantes que l'on me donne à lire ! Malheureusement, en France, les pièces qui se montent sont souvent celles qui ont trouvé l'argent, or l'argent n'a pas grand-chose à voir avec le monde du spectacle. Il appartient donc au directeur de ne pas faire de son théâtre un garage en louant sa salle au plus offrant." Souhaitons donc succès et longue vie à la nouvelle direction !
Paru le 12/10/2009