Dans son petit atelier débordant de toiles et pinceaux, Vittorio vit seul. S'il est un peintre talentueux, il ne se dévoile au monde extérieur que par des fausses toiles. C'est ce qui lui permet de vivre, ou du moins lui permettait. Vittorio vieillit, et sa sœur, Clara, s'inquiète. En effet, il tombe et perd en autonomie. Clara veut l'aider, veut l'accueillir chez elle mais il refuse. Les souvenirs vont alors se mélanger, entre les beaux moments de l'enfance et les regrets d'adulte.

Le texte de Fabio Marra est une fois de plus d'un réalisme exemplaire. Cette histoire est aussi une histoire de famille. La pièce se joue à la fois dans le présent, avec le retour de son fils, qu'il n'a pas vu depuis de nombreuses années, la progression de sa maladie ; mais aussi le passé, avec des flashbacks de l'enfance de Vittorio, et la culpabilité du peintre depuis la mort de sa mère. Du début à la fin, vous ne décrocherez pas un seul moment, croyez-nous !

La mise en scène bien pensée, et la présence d'écrans où sont projetées des peintures, se mêlent parfaitement. Les comédiens aussi sont parfaits ! Dominique Pinon, qui interprète Vittorio est criant de vérité. Catherine Arditi l'accompagne avec beaucoup d'humour et de tendresse. Fabio Marra, dans le rôle du fils est très touchant par sa naïveté, et son besoin d'amour paternel. Sonia Palau quant à elle, est le fantôme de la mère de Vittorio et Clara. Il n'y a que lui qui la voit, bercé dans ses souvenirs et sa culpabilité. Les flashbacks s'intègrent très facilement à l'histoire grâce à la douceur de cette mère. Floriane Vincent est la fille de Clara. Proche de sa mère, elle aspire à presque 40 ans à vivre sa vie, et partir. Enfin, Aurélien Chaussade semble avoir vendu des faux toute sa vie. À la fois escroc et voleur, il dessine aussi à son personnage un semblant de compassion.

« La Couleur des souvenirs » traite de nombreux sujets. Car si Dominique Pinon joue à merveille le peintre bougon et aigrit, il dévoile aussi l'enfant blessé par son père. « Mal-aimé », il est en proie à la jalousie vis-à-vis de sa sœur, et il est aussi plein de remords. Car finalement, comme beaucoup, il n'a jamais su dire aux autres l'amour qu'il leur porte. Sauf par ses peintures. Et son fils l'a compris. Sa maladie mettra un point final à sa profession de peintre comme il l'entendait jusque-là, mais permettra d'ouvrir une nouvelle page de son histoire familiale.

Un très beau tableau familial à découvrir jusqu'au 26 juillet 2026 au Festival d'Avignon, et on espère ensuite partout en France.