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D.R.
Portrait par Didier Roth-Bettoni
Sylvie Joly
Une idole qui aime ses fans… C’est du Joly !

À peine remise de la "der des ders" de "Je suis votre idole" à l'Olympia en juin, Sylvie Joly remonte sur scène pour un tout nouveau spectacle au théâtre des Mathurins composé pour moitié de chansons et de sketches : "Fans je vous aime". De l'inédit au programme...
Sylvie Joly telle qu'en elle-même. Chez elle, bel appartement d'un beau quartier parisien. La porte s'ouvre, la voilà, longue robe noire sans manches, chapeau noir (griffé) enfoncé sur la tête, larges lunettes orange. Et le sourire Sylvie Joly, ce sourire qui n'appartient qu'à elle, à la fois chaleureux et crispé, toutes dents dehors. Pas le temps de dire un mot qu'elle a déjà commandé un café à la femme de ménage : en anglais, avec un accent qui la fait elle-même éclater de rire. C'est parti : le show Joly a commencé. Car ce qui frappe - et dont on se doutait un peu à voir ses spectacles -, c'est que ce qui est drôle d'abord chez Sylvie Joly c'est... Sylvie Joly. Lapalissade ? Pas vraiment, car là où tant de comiques doivent en faire des tonnes et forcer le trait pour amuser la galerie, Sylvie Joly n'a qu'à paraître pour que ça marche. La preuve ? Elle en a même fait un spectacle : La Si Jolie Vie de Sylvie Joly, largement autobiographique, où elle racontait ses débuts d'avocate, ses premiers pas sur scène, ses ratages... C'est ce qu'on appelle une nature. Et la sienne, vue de près comme vue de la salle, est irrésistible. Alors bien sûr, Catherine, la grosse Touchard, la folle sexuelle, la lionne, la Madame Fox-Terrier du Miraculé de Jean-Pierre Mocky... tous ces personnages qui l'accompagnent sur scène depuis tant d'années, on les adore mais ce qu'on adore surtout, c'est la façon dont Sylvie Joly déboule sur scène ou cet art consommé avec lequel d'une mimique, d'un accent mis ici plutôt que là... l'humoriste donne vie à ses créatures qu'elle fait exister pour nous tout en restant elle-même. Pour ça, il faut un sacré talent. "C'est de l'instinct, dit-elle, ce qui est important c'est la sincérité pour saisir les petits riens qui font la différence entre les personnages."

"Ce sera comme une mini-comédie musicale"

Dans Fans je vous aime, des nouveaux personnages, il n'y aura que ça : "Une femme qui est éclairée et sonorisée en permanence. Partout où elle va, elle est suivie d'un éclairagiste et d'un ingénieur du son. Une autre qui ne parle qu'en disant des choses ordurières. Une baronne, une duchesse et une comtesse qui rackettent des jeunes dans la rue. Une grand-mère alsacienne à qui l'on offre un fauteuil Eversteel. Une femme qui dissèque le malheur d'une amie de façon sordide. Une autre entre les mains d'un masochiste. Une bourgeoise entichée d'un paysan. Une autre qui change complètement d'avis sur l'appartement qu'elle vient d'acheter. Une mythomane qui raconte ce qu'elle a vu à
l'Élysée. Une star de folklore." Épatant casting pour un spectacle où la ronde des sketches (écrits par Jean-Loup Dabadie, Pierre Palmade et Fanny Joly, entre autres) sera entrecoupée d'une douzaine de chansons toutes neuves elles aussi. "Ce sera comme une mini-comédie musicale", explique l'actrice qui s'est lancée dans l'aventure avec l'aide de Bruno Agatti qui signe ici la direction et la chorégraphie. "J'ai toujours eu ces chansons, certaines depuis que j'ai fait le Petit Conservatoire, je les garde comme un trésor. Bruno les avait entendues lors d'une soirée il y a plusieurs années, il voulait que je fasse un spectacle avec. J'avais travaillé avec un pianiste très brillant il y a deux ans, mais je me disais "on verra" sans rien en faire. Et puis, un jour, j'ai entendu Benabar et je me suis dit : "Mais c'est tout ce que depuis vingt ans on nous dit qu'il ne faut pas faire en chanson !" Et ça marche. Et c'est bien. Mes chansons c'est pareil. Il y en a deux de moi, une de Fanny (Joly), une de Salvador, une de Ricet-Barrier, une parodie de Carla Bruni, plein de choses différentes et un album prévu pour les réunir. Je n'ai jamais pris de cours de chant. On respire tous, donc c'est pas la peine de prendre des cours pour ça ! Bien sûr, je ne peux pas
chanter comme Pavarotti, mais ce n'est pas ce que j'aime, alors..."
Alors, c'est peu dire qu'on est impatient d'entendre le résultat. Mais comment ça se prépare tout ça ? "Nous y travaillons depuis janvier. On a commencé par la mémoire, lire les textes, les apprendre. Puis, petit à petit, nous sommes passés à l'interprétation. Il y a des choses que je cerne d'autres pas encore. Ensuite, il y aura la chorégraphie, l'essayage de la robe de Gaultier..." Planning chargé en perspective pour un changement de registre en douceur. Et quelque chose de plus radical, ça la tenterait ? "Je ne ferais pas au théâtre un personnage tragique, ce serait risqué. Mais au cinéma, oui, tout de suite. Mais c'est un tel privilège de faire rire, c'est un tel bonheur aussi quand on est en scène ! À une époque, je pensais que tout le monde a de l'humour. Ben, en fait, certains en ont plus que d'autres..."
Sylvie Joly, chez elle, en noir dans un fauteuil blanc, feuillette le classeur regroupant les textes de Fans je vous aime. Arrive son mari, projet d'affiche du spectacle en poche, un gros plan sur son visage, ses mains placées en coupe en dessous. "Regardez cette photo, mes mains, on dirait des pieds !"
Soupir et éclat de rire mêlés.
Paru le 15/09/2004