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Ludovic Michel
D.R.
Portrait par Caroline Fabre
Entre Les Déchargeurs, la poésie et Ludovic Michel, une histoire d’amour
Rencontre

Créé de « briques et de broc' » en 82 par Vicky Messica pour « honorer la poésie », notamment celle de Blaise Cendrars dont il détenait les droits, le Théâtre Les Déchargeurs est classé au titre des monuments historiques. Très discret jusqu'à présent, son codirecteur Ludovic Michel nous dévoile ses particularités.
Originaire de Franche-Comté, Ludovic Michel acquiert très tôt « la rage d'avancer » grâce à la compétition sportive (foot et athlétisme). Mais, les mots et le langage le fascinant, il approche très jeune le monde du théâtre. Son compatriote Jean-Luc Lagarce lui permet par exemple « de rester dans son sillage pour regarder, observer », confortant un besoin viscéral, « parvenir à faire vivre sur scène les écrits qui me touchent ». De la programmation de théâtres municipaux à la production en passant par l'organisation de concerts, la direction du "Gaumont Les Halles", la communication..., cet autodidacte apprend tout sur le tas, grâce aux rencontres qu'il initie.

En 99, il arrive aux Déchargeurs « gardien de la poésie », pour proposer un spectacle sur Anna de Noailles... « Et j'y suis toujours car j'y ai rencontré la femme de ma vie », Lee Fou Messica, qui se débat avec un lieu dont toutes les subventions émanant du Ministère de la culture depuis 20 ans furent brutalement coupées au décès de son fondateur, son mari. « En dix ans, en exploitant nos savoirs, parcours universitaire pour elle, terrain pour moi, nous avons créé un mode de fonctionnement économique différent ».

Aujourd'hui, le théâtre fait partie d'une société, Les Déchargeurs le Pôle, qui regroupe plusieurs entités : production, communication, relations presse et la salle. Ainsi, un spectacle créé, présenté et/ou simplement répété aux Déchargeurs s'envole, sans sectarisme aucun, vers CDN et/ou théâtres privés, le Pôle assurant la production et la médiatisation. Il peut encore arriver qu'un des invités d'une émission de France Culture, enregistrée au théâtre, flashe sur la salle et demande à la louer... comme Fabrice Luchini déclarant chaque jour sur scène « ce spectacle, je ne le donnerai qu'ici car ici les gens savent écouter ». Le Pôle peut aussi avoir des missions indépendantes, par exemple la communication print et web de la Comédie-Française comme la production ou la coproduction de gros spectacles en externe.

Revers de la médaille, en 2012, deux créances irrécouvrables par le Pôle ont mis le théâtre en péril. Ce problème est en passe d'être réglé grâce au redressement judiciaire demandé par Ludovic Michel lui-même. « Je n'ai pas honte et suis soulagé car j'ai failli perdre l'outil créé par le mari de ma femme ».

L'avenir ? « Pour les compagnies, plus de minimum garanti. Cela nuisait à notre image et pouvait influencer nos choix. Pour la programmation, nous revenons à nos bases, la création contemporaine et la poésie en direction d'un public ciblé, chaque siège de nos deux salles (20 et 80 places) étant important ». On verra ainsi en 2018 « Comme disait mon père » de Jean-Lambert Wild, Elizabeth Mazev dans « A 90 degrés », Aurélien Recoing dans un diptyque autour de David Mamet...

De belles rencontres en perspective !
Paru le 14/02/2018