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Gérard Caillaud
© J. Van D. Borght
Dossier par Manuel Piolat Soleymat
“À chacun sa vérité”
Gérard Caillaud :“J’aime dialoguer avec l’auteur”

En 1978, après sept années passés à la Comédie-Française, Gérard Caillaud reprend sa liberté
pour créer des auteurs vivants au sein de la troupe qu'il dirigera pendant vingt ans : la Nouvelle Compagnie. Aujourd'hui comme hier,il affirme sa passion pour la création contemporaine.
Quelle relation vous lie au théâtre vivant ?
Une relation intense. De la même façon que lorsque j'achète un tableau, j'aime rencontrer le peintre et parler avec lui de son travail, lorsque je joue ou monte une pièce de théâtre, j'aime dialoguer avec l'auteur. Ce qui m'intéresse, c'est la relation active avec lui, le chemin que l'on fait ensemble, les premières lectures, les
discussions...

Il vous est même arrivé de proposer des idées de pièces...
Oui, par exemple, à Antoine Rault, pour La Première Tête. D'ailleurs, je vais peut-être monter sa prochaine pièce, In extremis, qu'il a écrite à partir d'une comédie américaine que j'avais vue à la télévision. Du moment où chacun est à sa place, pourquoi un metteur en scène ne pourrait-il pas avoir une bonne idée pour un sujet de pièce ?

Vous êtes comédien et metteur en scène, vous avez dirigé le Théâtre des Mathurins. Quel est au juste votre métier ?
Tout simplement celui d'homme de théâtre. Je voulais vraiment faire toutes ces expériences. Vous savez, si l'on veut être à l'initiative de projets, on ne peut pas se contenter d'être comédien.

Alors, pourquoi avoir quitté les Mathurins ?
Parce que la charge devenait trop pesante. Et puis, je me suis rendu compte que ça m'éloignait un peu de la pratique du jeu. D'ailleurs, on me proposait moins de choses, les gens se disaient : "Caillaud, il dirige son théâtre, il n'a pas le temps de jouer..." J'ai eu besoin de me ressourcer en tant que comédien.

Parce que, pour vous, jouer la comédie doit tout de même rester au centre de votre vie artistique ?
Absolument. Jouer et mettre en scène. Mais pour la mise en scène, je n'ai ni la prétention, ni l'ambition de faire des relectures de pièces. Moi, ce qui m'intéresse, c'est faire du neuf, dire des choses nouvelles, traduire la pensée, le style, le talent de nouveaux auteurs, les présenter sur scène. Même si j'ai monté quelques classiques, l'essentiel de mes activités a toujours été la création contemporaine.

Votre plus grand succès a d'ailleurs été Les Palmes de M. Schutz, pour lequel vous avez obtenu un Molière de meilleur metteur en scène. Comment ce projet a-t-il pris naissance ?
J'avais eu l'occasion de lire plusieurs pièces de Jean-Noël Fenwick. Tout de suite, je me suis rendu compte qu'il y avait là un véritable d'auteur, une écriture, un style... Mais les pièces que j'avais lues ne me donnaient pas vraiment envie de les monter. Je lui ai donc demandé de penser à plusieurs thèmes pour que nous puissions en choisir un ensemble. Quelques semaines plus tard, il est venu me voir avec une idée de comédie sur Pierre et Marie Curie. Et là, j'ai dit banco !

Cette pièce a-t-elle connu un succès immédiat ?
Non, le démarrage n'a pas été facile ! Il est évident que si le metteur en scène n'avait pas été à la fois le directeur du théâtre, un des acteurs principaux et le producteur, à la cinquantième représentation, c'était fini. Mais j'ai tenu bon ! Il a fallu perdre beaucoup d'argent avant de commencer à en gagner ! Et finalement, la pièce s'est jouée près de 1500 fois en France.

Vous êtes actuellement sur scène dans
À chacun sa vérité. Vous n'aviez jamais joué
de Pirandello, auparavant ?
C'est vrai, jamais. C'est la première fois que je joue une pièce de Pirandello, c'est la première fois que je joue dans ce magnifique lieu qu'est le Théâtre Antoine, c'est la première fois que je travaille avec Bernard Murat... Ça fait beaucoup de premières fois ! Et tout ça me rend très heureux ! Je crois que la grande force de Pirandello, c'est qu'il sait à la fois faire réfléchir et émouvoir le public. Et ceci avec beaucoup d'humour, et surtout avec la force d'un véritable polar.

Qu'a apporté, selon vous, Bernard Murat ?
D'abord, c'est un formidable directeur d'acteurs. Il aime les comédiens. Il y avait très longtemps que je n'avais pas ressenti un tel plaisir à être dirigé. Je pense qu'il a eu raison de faire une lecture très ouverte de cette pièce, très large, ludique. Il a su garder un côté drôle à chaque fois que la pièce lui proposait cette option-là. C'est un contrepoids vraiment nécessaire à la misère humaine des deux principaux personnages.

"À chacun sa vérité"


La pièce
Trois nouveaux habitants intriguent la population d'une petite ville d'Italie : Mme Frola, sa fille et son gendre, M. Ponza. Pourquoi ce dernier interdit-il à sa belle-mère de rendre visite à son épouse ? Le mystère s'épaissit lorsque M. Ponza et Mme Frola s'expliquent de façon contradictoire. Tout ce petit monde va tenter de tirer au clair cette situation...


L'auteur
Si Luigi Pirandello (1867-1936) a écrit près de 200 nouvelles, 4 recueils de poèmes et 7 romans, c'est avant tout son théâtre qui lui valut d'être distingué par le prix Nobel de littérature en 1934. Se consacrant à l'écriture dès 1891, il ne devient célèbre qu'à 50 ans, grâce au triomphe d'À chacun sa vérité. Suivront de nombreux autres succès, dont Six personnages en quête d'auteur, Vêtir ceux qui sont nus, Henri IV... Plaçant le spectateur entre réel et fiction, raison et folie, Pirandello a donné son nom à une philosophie du théâtre, le pirandellisme.

La distribution
Mme Frola : Gisèle Casadesus.
M. Ponza : Niels Arestrup.
Lambert Laudisi : Gérard Desarthe.
M. Agazzi : Gérard Caillaud.
Mme Agazzi : Agathe Natanson.
M. Sirelli : Jean-Paul Muel.
Mme Sirelli : Fabienne Chaudat.
Mme Cini : Catherine Chevallier.
Le préfet : Joël Demarty.
Le domestique : Laurent Ferraro.
Mme Ponza : Anne Kreis.
Dina Agazzi : Salomé Lelouch.
Mme Nenni : Claire Magnin.
Le commissaire Centuri : Guilhem Pellegrin.
Paru le 15/03/2003