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Patrick Adler
D.R.
Dossier par Frédéric Maurice
Imitateurs :
chacun sa voix, chacun son chemin

L'un pourrait être le père de l'autre, et pourtant aucun lien familial ne les unit. Seule une filiation artistique et vocale les rassemble. La performance pour l'un et le rire pour le second. Rencontre.
Patrick Adler
retrouve son souffle


Trop longtemps absent des scènes parisiennes, Patrick Adler revient au Sentier des Halles. Ce persifleur de haut vol, connu dans les années 90 pour ses voix féminines, a remisé au placard ses copines les Vamps, Zézette et autres Maria Pacôme pour s'attaquer à du neuf. Son nouveau spectacle "Adler brise la glace" lui a rafraîchi les idées.

Fini le temps où il déboulait sur les plateaux de télé, les dents de travers en poussant le chariot de la Zézette du Père Noël est une ordure. La télé le boude un peu désormais, mais le public en revanche ne l'a jamais oublié. Presque sociétaire du Point Virgule qu'il a rempli pendant des années, il a décidé de renouveler le panthéon de ses célébrités : Olivia Ruiz, Diams, Philippe Katerine, Björk s'ajouteront à Dominique Besnehard, Brigitte Fontaine ou Jean d'Ormesson. En tout, une soixantaine de voix, sauf la sienne. Il les réunira dans un grand concert de solidarité pour sauver la banquise : les Frigos du cœur, animés par Stéphane Bern et Benoît Poelvoorde. Patrick Adler a voulu mettre toute sa folie dans son nouveau show. Il s'est éclaté à créer des couples parfaitement improbables où madame de Fontenay retrouve Régis Laspalès et Line Renaud accompagne Jean-Pierre Coffe. Cette fois, Adler fonce dans ce qu'il sait faire le mieux : rire. Plusieurs expériences scéniques l'avaient poussé à jouer dans le registre de l'émotion mais avec un succès mitigé. "Il ne faut pas emmener les gens là où ils ne t'attendent pas", confie-t-il. Son concert des "Frigos du cœur" sera également pour lui l'occasion de se faire plaisir. En effet, il va chanter à cœur joie : "Plus de la moitié du spectacle sera composé de chansons." C'est à se demander s'il n'y a pas chez Adler une frustration commune à tous les imitateurs de ne pas avoir fait une autre carrière. Un questionnement qu'il balaye d'un revers de main fort de ses quinze années de cours d'opéra.

Mais Adler, c'est aussi une capacité presque génétique à persifler, se moquer de ses contemporains, voire de ses collègues de scène. Efficace sur les planches, ça lui a joué des tours avec le milieu du spectacle qui lui en a parfois tenu rigueur. "Je ne regrette aucune de mes vacheries, elles m'arrivent naturellement." D'ailleurs des vacheries, les journalistes ne sont pas les derniers à lui en sortir, lui faisant remarquer que sur Internet, son nom est surtout associé à "stars-oubliees.com". Digne, il assure ne pas avoir moins de talent qu'avant et remercie son producteur Olivier Besançon d'avoir fait confiance à un artiste de près de 50 ans. On n'est pas fini à son âge, et le succès rencontré par ses prestations au dernier Festival d'Avignon lui a donné l'énergie de repartir. Si Adler s'amuse de ses frigos, lui, en tout cas, n'est pas dans un placard.

Michaël Gregorio
Fortissimo


Il y avait "The Body" quand on parlait du mannequin Elle Macpherson, il y aura désormais "The Voice" quand on évoquera Michaël Gregorio. Cet imitateur était déjà un impressionnant performer. L'écriture de Laurent Ruquier lui permet de se hisser parmi les plus grands de sa catégorie.

Grand... ça n'est pas exactement le qualificatif le plus approprié pour Michaël Gregorio. C'est un tout petit bonhomme à la tignasse romantico-ébouriffée. Difficile d'imaginer que de ce corps menu puisse sortir des sons aussi puissants que le Caruso de Luciano Pavarotti. Et pourtant... même pas peur ! Il réussit à s'approprier la tessiture des chanteurs les plus mythiques : Brel, Piaf, Armstrong, Ray Charles, Joe Cocker ou Freddie Mercury. "J'avais beaucoup de mal à capter celle de Ray Charles, surtout que j'aurais rêvé le rencontrer. Et bizarrement, c'est au lendemain de sa mort que j'y suis arrivé."
À seulement 23 ans, il peut facilement souffrir la comparaison avec Thierry Le Luron. En dehors de la taille, leur sens du music-hall les associe dans une évidente convergence artistique. Dès 16 ans, il avait déjà bluffé le public de Graines de Stars sur M6. Depuis cette époque, il s'est rodé, notamment au Dom Camillo, en poussant de la voix entre la poire et le fromage. C'est là que Laurent Ruquier l'a repéré et lui a permis d'aller plus loin. En effet, Michaël Gregorio épatait son public par sa puissance vocale, mais il manquait du texte que l'animateur de France 2 lui a apporté. Difficile de travailler avec une telle pointure du show-biz ? "Pas du tout, c'est quelqu'un de très ouvert. On débat, on échange, on s'équilibre et ça m'évite de tomber dans l'écueil du simple concert où je serais trop à fond dans la performance."

En arrivant cet automne sur la scène de l'Européen, il va pouvoir donner toute la dimension de son talent. Accompagné par un orchestre live de quatre musiciens, il chantera face à un écran géant où seront diffusées les images des artistes qu'il plagiera. On sera très loin de l'imitation traditionnelle, d'ailleurs aucune voix parlée n'y figurera. Mais les chanteurs cultes ne seront pas les seuls à rythmer ses prestations : Mika, Cali, Mylène Farmer, Calogero ou Julien Doré, dernier lauréat de Nouvelle Star, rejoindront Les Stones, William Sheller et les Cure.

"J'aurais voulu être un chanteur" : titre de son show ou vœu pieu ? Il est très jeune et sa carrière s'annonce longue, donc tous les espoirs lui sont permis. En attendant, ce sera la première fois de sa carrière qu'il enchaînera autant de dates les unes à la suite des autres. Sachant qu'il sort "fracassé" de ses spectacles "parce que j'essaye toujours de chanter dans la tonalité originale", c'est un Michaël Gregorio lessivé, mais comblé que l'on risque de retrouver au soir du 31 décembre. "Si Dieu me prête voix", s'amuse-t-il.
Paru le 21/11/2007