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D.R.
Dossier par Alain Bugnard
"Jeffrey"
AuThéâtre Clavel

Fort du succès de «Torch Song Trilogy», le metteur en scène québécois Christian Bordeleau poursuit son exploration de pièces gays inédites en France avec «Jeffrey», de l'Américain Paul Rudnick, créée à Broadway en 1993, et qui traite, sous l'angle de la comédie, des peurs
paniques déclenchées par l'arrivée du sida.
Christian Bordeleau,
adaptateur et metteur en scène


«Tout en les caricaturant, Paul Rudnick a mis en parallèle ses angoisses et celles de la société américaine qui, face au sida, développe les comportements et les craintes les plus ridicules. Il fait donc de cette tragédie une véritable comédie urbaine. Tout se passe dans la tête de Jeffrey. La pièce met en scène vingt-cinq situations en forme de sketches. Certains sont tendres, amoureux, d'autres colériques, violents, empruntant tour à tour à la parodie, l'ironie ou la Commedia dell'arte. C'est une pièce qui surprend car on ne sait jamais à quoi s'attendre à la séquence suivante. C'est une mise en abyme de nos peurs et de nos angoisses face à tout ce qui paraît incontrôlable. Bien qu'écrite en 1993, cette pièce est toujours d'actualité car nous ne sommes toujours pas venus à bout du sida, malgré les trithérapies. Il faut continuer à instaurer un dialogue social autour du sida, autrement que par les discours politiques ou publicitaires qui se révèlent souvent hermétiques.»

Julien Baptist est Jeffrey
On a pu l'apercevoir dans Marie-Antoinette de Sofia Coppola, mais on le connaît surtout pour sa participation à l'émission Nouvelle Star sur M6. Et tandis qu'il prépare un album solo, Christian Bordeleau lui offre son premier grand rôle sur une scène parisienne : «Jeffrey est un gros consommateur de sexe ancré dans ses certitudes ; mais le sida va faire voler ses repères en éclats. Il cherche un nouveau sens à sa vie puisqu'il a décidé de ne plus avoir de relations sexuelles. On peut parler de road movie puisqu'il va croiser des gens plus fous les uns que les autres qui, contrairement à lui, ont cette particularité de vivre pleinement ce qu'ils sont. Bien qu'il soit le personnage éponyme, le public va finir par le détester tellement il est en contradiction avec lui-même et sourd aux conseils de ses amis ! Christian a pris le parti de le rajeunir afin qu'il devienne le porte-parole d'une génération pour qui les notions de sida et de protection sont tombées en désuétude. Il est affolant de constater à quel point les jeunes gens considèrent cette maladie comme désormais curable tout en la résumant à 'un problème de vieux'... Par son tempérament excessif, Jeffrey exprime également cette radicalisation propre à la jeunesse actuelle, qui perd de vue le sens de la vie.»

Samuel Ganes

Acteur militant et fier de l'être, Samuel Ganes fut récemment à l'affiche de Vive la France, de Hervé Bernard Omnès, mais également le créateur du monologue Penis Desiderantis. «Stéphane est le personnage de l'amoureux transi. Il s'éprend de Jeffrey qui le rejettera quand il lui annoncera sa séropositivité. C'est le personnage du public, celui qu'on aime pour sa franchise. Il dit tout, ne s'interdit aucune parole, sans doute car il est dans une notion d'urgence. On est dans une image très positive de l'homosexuel séropositif, à la fois mature et responsable, loin de l'archétype du mec malsain et autodestructeur. Et en plus, il croit en l'amour !»

Édouard Thiébaut

S'il se considère physiquement plus proche de Fred Astaire, Édouard Thiébaut fut appelé à jouer sur scène des rôles tenus par Gene Kelly à l'écran ! Il fut ainsi Don Lockwood pour Chantons sous la pluie au théâtre de la Porte Saint-Martin et Andy Miller pour Les Demoiselles de Rochefort au Palais des Congrès. «C'est la première fois que je jouerai sans le support de la musique ! Ce challenge va me permettre de montrer que je ne suis pas seulement un acteur de comédie musicale ! Je suis Sterling, le meilleur ami de Jeffrey. C'est quelqu'un de très précieux, de mondain avec une sorte d'élégance poussée en permanence à son paroxysme. Il aborde les choses de manière légère mais a une réelle gravité intérieure. Il forme avec Darius un couple qui n'est pas sans rappeler celui de Puck et Oberon dans 'Le Songe d'une nuit d'été'. C'est une pièce que je trouve très représentative de notre époque car elle évoque cette difficulté à s'engager et qui génère un climat social dans lequel il est difficile de s'insérer à tous les niveaux, et qui rend difficile la construction d'un avenir serein.»

Cyril Montero

S'il fut de l'aventure initiée par Robert Hossein au Palais des Congrès, On achève bien les Chevaux, Cyril campe ici son premier rôle de composition : «Darius est danseur, doublure dans 'Cats'. Il ressemble d'ailleurs à un petit chat. Il est très félin, toujours dans une humeur très positive. C'est le rayon de soleil de la pièce. Bien que gravement malade du sida, les médicaments ne faisant plus effet, il reste heureux de vivre, militant pour la vie. On se rend compte, au fil de la pièce, à quel point l'amour et le soutien sont des armes essentielles pour combattre la maladie, et que le bonheur reste avant tout une affaire personnelle.»

Renato Ribeiro

Comédien et directeur artistique de La Comedia, Renato Ribeiro a récemment signé la mise en scène de Lettres de délation. Il incarne ici les différents personnages qui mettent Jeffrey en conflit avec son abstinence, ainsi qu'un prêtre homosexuel, «intimement convaincu que sa sexualité est acceptée par Dieu puisque Dieu est amour, et qu'amour égale plaisir et sexualité ! Délivrés de leur apparence comique, ses propos sont excessivement justes, notamment ses critiques de la Bible et du Vatican. Je suis très heureux, après avoir vécu les années sida et assisté à tellement de déchéances, d'exclusions et d'inacceptations de soi, de pouvoir pointer du doigt cette barbarie dont nous sommes tous capables».

Jean Leloup

Il fut Richard III, Ruy Blas ou encore Parker dans L'Éventail de Lady Windermere au théâtre du Palais-Royal, et tandis qu'il mène conjointement trois projets de mise en scène - L'Œil des royaumes, pièce comique néo-moyenâgeuse ; Fumée de l'Espagnol Juan-Carlos Rubio, avec «idéalement» Caroline Cellier ; Frustrations, où sont passés les slows ?, dont il est l'auteur - Jean Leloup est appelé, pour Jeffrey, à jouer les hétérosexuels bourrins de service, soient «un directeur de casting, un journaliste télé niais, un casseur de pédés, un facho, un docteur benêt et le père de Jeffrey avec lequel ce dernier fantasme une conversation sans tabous !».

Émilie Coiteux

De l'animatrice télé potiche, à la mère de Jeffrey, en passant par une compulsive sexuelle, un gourou - «absolument affreuse puisqu'elle explique à ses fidèles que le manque d'amour est à l'origine du sida» - ou encore une évocation muette de Mère Térésa, Émilie Coiteux, que l'on a pu voir dans Les Abîmées de Mickaël Cohen aux Déchargeurs, incarne toutes les figures féminines de l'épopée de Jeffrey : «En tant qu'unique représentante du beau sexe, je suis très chouchoutée !»
Paru le 26/01/2007

(29 notes)
JEFFREY (CLAVEL)
THÉÂTRE CLAVEL
Du mardi 9 janvier au samedi 28 avril 2007

COMÉDIE. Jeffrey, un hymne à la vie, un hymne à l’amour! Entre peur et angoisse, Jeffrey cherche le sens de la vie. Tout à sa quête éperdue, saura-t-il reconnaître l’Amour qui se présente à lui: Stéphane, le Prince Charmant tant attendu? Sur le ton d’un cabaret disco, Jeffrey, une comédie festive, urbaine ...

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