Créée en 1970, représentée depuis plus de cinq cents fois, Ne réveillez pas Madame de Jean Anouilh est une pièce mordante et empreinte de nostalgie sur le théâtre. Francis Perrin en signe la mise en scène et y interprète le personnage miroir d'un acteur-metteur en scène. Un rôle taillé sur mesure.

Julien Paluche a consacré son existence au théâtre et aux femmes. Deux passions dévorantes qui lui rendent bien mal son sens du sacrifice. Au bord de la ruine, il s'apprête à remonter l'un de ses plus gros succès avec en vedette Aglaé, sa seconde épouse. Mais celle-ci, trop à l'étroit dans le rôle de faire-valoir de Madame Paluche, affiche sa liaison avec un jeune acteur. L'histoire se répète sans fin car, lors de création du même spectacle, Paluche découvrit que Rosa, sa première femme, le trompait sans vergogne. Mais la première à lui avoir été infidèle, et à qui il ne pardonna jamais, fut sa mère (Christiane Minazzoli), actrice cocotte qui délaissait ses devoirs de mère pour les planches et les bras de ses partenaires.

Par la magie du plateau où tout est possible, les trois femmes assaillent la mémoire de Paluche dans une pièce où passé, présent et futur se télescopent. Anouilh ne règle aucun compte. Il s'attache au contraire à mettre à nu ce paradoxe de la douleur et de la jouissance, du mensonge et de la sincérité, qui est le lot des artisans de la scène. Le tout avec un humour grinçant et une poésie que Francis Perrin et sa troupe de comédiens font entendre avec un art subtil de la nuance.