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Catherine Rich
© E. Robert Espalieu
Zoom par Marie-Céline Nivière
L'homme du hasard
au théâtre de l'Atelier

Partition pour virtuose

Lors de la dernière remise des Molières, Philippe Noiret avait prévenu, la concurrence sera rude. Il allait être de nouveau sur scène, avec un texte de Yasmina Reza, dans une mise en scène de Frédéric Bélier-Garcia, avec pour partenaire la délicieuse Catherine Rich.
Un compartiment de train, un homme, une femme. Ils vont se retrouver face à face durant tout le voyage. Situation banale, sauf qu'il est un grand écrivain et qu'elle a, au fond de son sac à main, son dernier roman. Elle l'a reconnu, mais n'ose l'aborder.
Que fait-on dans un train ? On pense, on observe. Lui pense à son livre, à sa vie, à ses colères, à ses intestins (sic), se trouve amer. Elle pense à lui, à ses livres. Elle songe que les hommes qu'elle a chéris ressemblaient aux personnages de ses romans. Elle a peur que sa rencontre avec « son écrivain » soit décevante. Elle a peur d'être banale, comme l'est en soi la situation. S'il ne la regarde pas tout de suite, il finit par être intrigué par cette femme qui ne lit pas. Car dans un train, une femme lit toujours quelque chose, un livre, une revue. Bien sûr, elle va le sortir ce livre. Bien sûr, ils vont se parler. À nous d'imaginer la chute.

Une belle écriture

Yasmina Reza écrit merveilleusement bien, on le sait. Elle manie les mots, les sentiments avec une belle sensibilité, une intelligence, une pertinence... L'Homme du hasard se résume à une histoire de rencontre. Comment elle se réalise ou ne se réalise pas. Ici, elle fait se croiser deux êtres. Ils sont à un moment crucial de leur vie. La solitude les a rattrapés.
Numéros d'acteurs

Philippe Noiret est colossal. Il y a du Romain Gary dans son personnage. Il y met les angoisses, les doutes et le charme. Et puis, aucun de nous ne peut résister à son immense éclat de rire à la fin de la pièce. Face à cette montagne, il y a la souris ! Catherine Rich. Elle va vous surprendre dans ce rôle en or. Elle a préparé un cocktail fait d'une bonne rasade d'humour, d'une dose de gaminerie, d'un zeste de tendresse, d'un doigt d'ironie. Le mélange est explosif.
Cette pièce, composée en grande majorité de monologues qui se croisent, oblige les comédiens à avoir de longs moments de silence. C'est surprenant de regarder Noiret et Rich à ces moments-là. Le grand orchestrateur de ce spectacle est Frédéric Bélier-Garcia. Dans les décors de Jean Hass et les lumières de Patrice Trottier, il a réalisé une très belle mise en scène. Rien n'est statique, son train bouge, évolue comme les personnages.
Paru le 23/03/2001