Connexion : Adhérent - Invité - Partenaire

Christiane Liou
D.R.
Portrait par Manuel Piolat Soleymat
Christiane Liou
auteur de « Extrême Nudité » à l’Essaïon

Subversive ? Affirmatif !
Le moins que l'on puisse dire est qu'elle n'a ni froid aux yeux, ni sa langue dans sa poche. C'est une rebelle, une lyrique, un rien grandiloquente... Mais ne vous y méprenez pas, elle sait aussi taire ce qu'elle ne veut pas dévoiler. Toujours authentique, Christiane Liou est avant tout une femme qui a juré de ne jamais se prendre au sérieux. Extrême Nudité est sa première pièce. La mise en scène est signée Hans Peter Cloos.

Christiane Liou aime la vie de façon immodérée. Tout juste la cinquantaine, elle déclare avoir toujours vécu sans se soucier des règles établies. « Je trouve que les gens sont beaucoup trop normatifs et qu'ils ne vivent pas forcément bien avec ça. On est cerné par le mensonge. Pour moi, il n'y a rien de pire. Car le mensonge avilit l'homme, il est cause de frustrations, de souffrances inutiles. La vie est un cadeau formidable, alors autant la vivre le mieux possible ! » Un point de vue très nietzschéen... Et pour cause, elle adore la philosophie, et Nietzsche tout particulièrement. « C'est un penseur qui me passionne car il veut tout remettre en question. Sa démarche va aux sources, aux instincts, à l'inconscient. Il s'agit d'une pensée du sous-sol. »

Bien avant de s'intéresser à la philosophie, elle découvre la littérature, avec Zola, à 15 ans. Puis ses lectures s'orientent vers Bataille, Blanchot, Sade, Sartre, Camus... À 30 ans, elle écrit un recueil de nouvelles qu'elle range aussitôt dans un tiroir. Ce n'est que l'année dernière qu'elle ressort celle qui lui tient le plus à cœur pour en faire une pièce de théâtre. Extrême Nudité est née. « À l'époque, la vie m'intéressait plus que l'écriture. J'avais besoin d'expérimenter le maximum de choses. Aujourd'hui, je suis beaucoup moins dans l'urgence. Je prends le temps d'écrire. Mais je ne serai jamais une fonctionnaire de l'écriture ! Je ne me lève pas le matin à six heures pour me mettre devant mon ordinateur. Beaucoup d'écrivains se créent une discipline très rigoureuse. Je respecte totalement ça, mais ce n'est pas mon cas. J'écris quand j'en ressens la réelle nécessité. Pour moi, c'est très pulsionnel. Vous ne m'entendrez pas dire " si je n'écrivais pas, je me suiciderais ". Non ! Quand je n'écris pas, je fais autre chose et je vis très bien ainsi. »

La pièce débute comme une intrigue policière. Au petit matin, un commissaire se présente au domicile d'Ariane. Pierre, son époux, est mort dans la nuit. Il s'agirait d'un suicide. La jeune femme est interrogée sur les circonstances du drame. Peu à peu, elle livre jusqu'aux détails les plus intimes de sa vie de couple. « C'est avant tout l'histoire d'une passion, d'un amour dévorant entre un homme et une femme qui ont un jour décidé de défier les normes, les lois établies par la société. Car Ariane et Pierre sont complètement insatisfaits de la réalité qui les environnent. Ils ont trouvé, par le biais de la sexualité, une façon de vivre autrement, en inventant une nouvelle forme d'amour, sans pénétration sexuelle, pour pousser leurs désirs jusqu'à l'extrême. La question que pose le texte est avant tout celle de la solitude, celle de savoir comment Ariane va gérer la disparition de Pierre qui, au-delà de la mort, lui transmettra un dernier message. »

Fidèle à son esprit contestataire, Christiane Liou a voulu écrire une pièce bousculant les idées reçues sur l'amour, quitte à choquer certaines âmes « vertueuses ». « Je ne conçois pas l'écriture autrement qu'issue des tripes. C'est comme une digestion, on assimile son vécu et on le recrée. Si c'est faire de l'encre pour faire de l'encre, ça ne m'intéresse pas. »
Paru le 15/11/2000